1. |
||||
Qu’on a du plaisir aujourd’hui
D’être à la table avec nos amis ;
L’on boit, l’on rit, l’on chante,
Grand Dieu qu’on a de l’agrément
Quand c’qu’on est tous ensemble.
Si ce temps-là pouvait durer,
On cesserait de travailler :
On vivrait tous à notre aise,
Et on serait cent fois plus heureux
Que les saints dans leur gloire.
Mais ce temps-là ne dure pas,
Voilà ma bouteille qui s’en va ;
Et quand elle sera vide,
Plus de plaisir et plus d’agrément,
Nous resterons tout tristes.
Madame l’hôtesse, versez-nous du vin, (bis)
Du meilleur de votre cave,
Et quand nous n’aurons plus d’argent,
Nous vous baill’rons des gages.
Quels gages nous baillerez-vous ? (bis)
Des manteaux d’écarlate ;
Ce s’ra pour faire de jolis cotillons
Pour vos jeunes gaillardes.
Jeunes garçons, montez en haut,
Montez dans ces chambres les plus hauts ;
Vous trouverez trois jolies filles,
Trois jolies filles, trois jolies demoiselles,
Trois jolies à la mode.
Ces à la mode, les aimons pas,
Ces à la mode, n’en voulons pas ;
Nous voulons d’ces jeunes Françaises
Qui ont toujours la bouteille en main
Pour nous verser à boire.
Voilà la fin de ma chanson,
Il faut vider verre’ et flacons.
Et quand ils seront vides,
Plus de plaisir et plus d’agrément,
Nous partirons, tout tristes.
|
||||
2. |
||||
Bacchus assis sur un tonneau
Nous y défend de boire de l’eau :
Ni de puits, ni de fontaine,
Il faut boire la tasse pleine,
C’est, c’est, c’est,
C’est le vin nouveau qui fait vider les bouteilles,
C’est, c’est, c’est,
C’est le vin nouveau qui fait vider les pots.
Bacchus assis sur son tonneau
Faisait la guerre aux buveurs d’eau :
— Retire-toi, corps-e de glace,
Ça n’est pas ici ta place,
C’est, c’est, c’est […]
Le roi de France, aussi l’empereur,
N’ont pas connu notre bonheur :
Avec tous les gars d’la classe,
Nous buvons la forte tasse,
C’est, c’est, c’est […]
Quand les filles et les femmes fileront,
Les hommes et les garçons boiront ;
Assis autour de la table,
Ils boiront à la rasade,
C’est, c’est, c’est […]
Si Dieu voulait s’y faire aimer,
Il se ferait cabaretier :
À la place de la prière,
Le rhum, le whisky, la bière !
C’est, c’est, c’est […]
|
||||
3. |
||||
J’aime ma mie, j’aime aussi ma bouteille,
Toutes les deux ont su charmer mon cœur,
J’aime ma mie par son humeur,
Et ma bouteille, et ma bouteille,
J’aime ma mie par son humeur,
Et ma bouteille par sa liqueur.
⎯ La belle, vous avez deux pommes
Que je chéris si tendrement,
J’les cueillerais si goulûment
Comme fit le premier des hommes,
Je monterais sans faire de bruit
Dans l’arbre qui produit le fruit.
— Monsieur si mes pommes vous plaisent,
Je vous le jure, en vérité,
Dans l’arbre vous pouvez monter
Pour les cueillir tout à votre aise,
Et si l’arbre vous paraît doux,
Mettez-vous à l’ombre dessous.
J’avais promis à ma chère maîtresse
De l’aimer jusqu’au tombeau ;
C’est sur la feuille d’un ormeau,
Qu’j’avais signé cette promesse,
Il s’éleva un petit vent,
Adieu la feuille et le serment.
Nous voilà tous, mes amis, à la table,
N’y pensons plus qu’à nous divertir,
Et quand on a bien su choisir,
Que la débauche est agréable,
Et quand on a bien su choisir,
On boit le vin avec plaisir.
Si les jambes me font des gestes,
Et si je fais quelques faux pas,
Non jamais je ne tombe en bas,
De tous côtés je me redresse,
Et jusqu’à la fin de la nuit,
Le flambeau du vin me conduit.
D’une bamboche sans pareille,
On dit que j’abrège mes jours ;
Je me ris de tous vos discours
Tout en caressant ma bouteille,
J’ai commencé dans mon berceau
Je finirai dans mon tombeau.
Quand je s’rai mort, chers camarades,
Vous metterez dans mon tombeau
Une bouteille de vin nouveau,
Une saucisse, une salade :
De ce bon vin nous n’aurons pas
Quand nous serons dans ces lieux bas.
|
||||
4. |
||||
Ma maîtresse fait bien sa fière
Quand elle me dit qu’elle ne veut plus m’aimer.
Mais elle, mais elle pourrait bien s’y tromper,
Pour un amant qui la fréquente,
Mais elle, mais elle pourrait bien s’y tromper,
Pour un amant qui l’a tant aimée.
En passant devant sa porte,
J’ai t-entendu qu’elle parlait mal de moi.
Mais moi, mais moi qui cultivait son cœur,
N’aurais-je pas la récompense ?
Mais moi, mais moi qui cultivait son cœur,
N’aurais-je pas la plus belle des fleurs ?
À ta santé, cher camarade,
À ta santé, buvons de ce bon vin !
Peut-être, peut-être que nous en boirons pas,
De ce bon vin dans l’autre monde ?
Peut-être, peut-être que nous en boirons pas,
De ce bon vin dans ce pays-là ?
Qui a planté la vigne ?
N’a-t-il pas fait une bonne action ?
Surtout, surtout pour ces jeunes garçons,
Qui aiment à boire à la bouteille,
Surtout, surtout pour ces jeunes garçons,
Qui aiment à boire quand le vin est bon.
|
||||
5. |
La vie d'un jeune garçon
02:21
|
|||
La vie d’un jeune garçon,
C’est la vie la plus aimable
Quand on a d’l’argent
Pour passer son temps,
À rire, à chanter,
À boire à plein verre,
À ne jamais penser
De s’y marier.
Du temps que j’étais jeune,
J’avais du plaisir,
J’avais de l’argent
Pour passer mon temps,
À rire, à chanter,
À boire à plein verre,
À ne jamais penser
De m’y marier.
Mon père m’a toujours dit
Qu’il faut savoir choisir,
Avant d’s’y marier
De peur de s’y tromper :
⎯ Vous l’avez dit, mon père,
Qui choisit prend pire,
C’qui est arrivé
À vous le premier.
À rire, à chanter […]
Pour finir cette chanson,
Il faut vider les verres,
Et remplir les cruchons
Pour s’mouiller l’gorgoton.
Encore un p’tit coup |
Tandis qu’on est jeune, |
Et encore un p’tit coup, | (bis)
Ça n’dure pas toujours.
|
||||
6. |
Les philosophes buveurs
03:52
|
|||
Je cherche en vain la vérité,
Si le vin n’aide à ma foiblesse,
Toute la docte Antiquité,
Dans le vin puisa la sagesse ;
Oui c’est par le bon vin
Que le bon sens éclate,
J’en atteste Hypocrate,
Qui dit qu’il faut à chaque mois
S’enyvrer du moins une fois.
Socrate, cet homme discrèt,
Que toute la Terre révère,
Alloit manger t-au Cabarèt
Quand sa femme étoit en colère.
Pouvons nous faire mieux
Que d’imiter Socrate,
Et de suivre Hypocrate,
Qui dit...
Platon fut nommé le Divin,
Parce qu’il étoit magnifique,
Et qu’il regaloit de son Vin,
La Cabale Philosophique.
Sa table fut toujours
Splendide et délicate :
Il suivoit Hypocrate,
Qui dit...
Aristote buvoit autant,
Et nous avons lieu de le croire,
De ce qu’Alexandre le Grand,
Son disciple, aimoit tant à boire,
Qu’il dégueula cent fois
Sur les bords de l’Euphrate,
En suivant Hypocrate,
Qui dit...
Diogène aimoit, dit-on, l’eau,
Mais il n’eut point cette folie :
Il se logea dans un tonneau
Pour sentir l’odeur de la lie,
Et pour mieux boire au pot,
Il jeta là sa jatte
Et tint pour Hypocrate,
Qui dit...
Thalès sut identifier
L’eau comme l’élément le plus digne ;
Thèse simple à justifier,
Sans eau n’y auroit point de vigne.
Sans eau point de ce joli liquide écarlate
Dont parloit Hypocrate,
Qui dit…
Héraclite toujours étoit
En pleurs, à ce que dit l’Histoire ;
Mais c’est que le Vin lui sortoit
Par les yeux, à force de boire.
Par ce remède seul
Il guérissoit sa rate,
Comme ordonne Hypocrate,
Qui dit...
Démocrite près de sa fin,
Par une invention jolie,
En flairant seulement le Vin,
De trois jours prolongea sa vie.
Le Vin retarde plus
La mort qu’il ne la hâte :
Témoin, notre Hypocrate, [...]
Qui dit...
|
||||
7. |
||||
C’est dans la Nouvelle-de-France
Oui, ya des charmants appâts ;
Quand j’m’en vas la voir sus y-elle,
Vraiment, oui, j’ai du malheur :
D’un côté je crains sa mère,
De l’auter côté j’crains sa sœur.
Me v’là d[on’]assis à la table,
Ma bouteille auprès de moi ;
Dans ma main, je tiens mon verre,
Sur mes genoux, ma Clorie,
Mon auter main ma bouteille,
J’en boirai tout en ma vie.
Ma maîtresse qu’est si chagrine,
Dit que j’en bois trop souvent ;
C’est pour déssipér les peines,
Belle, que j’ai en vous aimant,
Permettez, oui, que j’vous aime,
Non, belle, j’en boirai pas tant.
Toutt’ les oiseaux du boucage
Z-ambandonnont le troupeau ;
Z-ils s’en allont près du rivage
L’long de ces coulants russeaux,
L’amour fait plus de carnage
Que cent loups d[an’]un troupeau.
Me v’là don’ pour rester fille,
Vraiment, oui, j’ai eu malheur
D’y faire la difficile
Auprès d’un amant constant,
Ça-l m’y prendra plus facile
Auprès d’un amant chéri.
|
||||
8. |
Roulons-la, la bouteille
03:28
|
|||
Parlons de boire, je m’en fais z-une gloire,
Parlons d’aimer, non pas d’s’y marier,
Une fois marié, faut s’y mettre en ménage,
Quand on a des enfants, plus de soulagement.
Et roula-la, bouteille sur bouteille,
Et roula-la, bouteille à tour de bras,
Et roula-la toujours, bouteille sur bouteille,
Et roula-la toujours, le plaisir et l’amour.
Et si je prends une femme qui soit pauvre,
En grand danger c’est de devoir travailler.
Elle aura des enfants qui m’appelleront père :
— Papa, donne du pain, ou nous mourrons de faim.
Et roula-la, bouteille sur bouteille […]
Et si je prends une femme qui soit riche,
En grand danger de me le faire reprocher.
Viendra t-au cabaret, me traitera d’ivrogne :
— Ivrogne, tu ne vaux rien, tu dépenses tout mon bien.
Et roulons-la, la bouteille, la bouteille,
Et roulons la, la bouteille à tour de bras,
Et roule, roulera la bouteille sur la table,
Et dureront toujours le plaisir et l’amour.
Et si je prends une femme qui soit laide,
En grand danger c’est de devoir la garder.
Toujours devant mes yeux, cette vilaine laide,
Toujours devant mes pas, celle que je ne veux pas.
Et roulons-la, la bouteille, la bouteille […]
Et si je prends une femme qui soit belle,
En grand danger des cornes à porter.
Elle aura des amants qui la trouveront belle
Et moi, l’amant cocu, je deviendrai foutu.
Et roulons-la, la bouteille, la bouteille […]
|
||||
9. |
||||
À boire, à boire, mes chers amis,
Vous m’avez l’air tous endormis !
À boire, ça nous réveille,
Prends ton verre et moi le mien,
Vidons cette bouteille.
Quand je reviens du cabaret,
Ma femme est fâchée contre moi ;
Elle dit : — Plus de ménage !
J’ai trois enfants présentement,
Faisons notre partage.
— Ces trois enfants présentement,
J’en mettrai yun dans un couvent
Et l’autre au séminaire,
Le troisième restera ici
Pour m’y verser à boire.
Auparavant que de partir,
Il faut la vider, la remplir.
Buvons à la rasade,
À la santé de tous nos amis,
De tous nos camarades !
Voilà la fin de ma chanson,
Il faut vider verres et flacons,
Les flacons, les bouteilles,
Les bouteilles et tous les tonneaux,
Voilà t-une merveille !
|
||||
10. |
La malheureuse boisson
03:12
|
|||
La malheureuse boisson,
Toi qui n-est la mère du démon ;
Mais toi qu’il n-est souvent la cause
Mais de toutes ces damnations.
Mais quand c’qu’un homme a dans la tête
Z-un objet de cette boisson,
Z-il pourrait-il avoir d’autre chose
Que d’en avoir une méchante raison ?
Le dimanche est notre messe,
À toutes les mois, c’est not’ communion.
Tout le monde de la tempérance,
Z-il me fait t-une grande procession.
Notre curé qu’il montre en chaire,
Qui nous fait des longs sermons,
I’essaye bien de nous faire accroire
Que le diable est dans la boisson.
Mais vous descendrez dans sa cave,
Z-et vous n-en trouverez des gallons.
Z-et moi-même, si je m’f’rais prêtre,
Mais z-un prêt’, c’est pas mon nom :
Je n’suis méchant sur la terre
Et je l-aime beaucoup la boisson.
|
||||
11. |
Buvons, ma cousine
02:38
|
|||
⎯ Buvons ma cousine
Cinq à six chopines,
Buvons du vin nouveau |
Qui est dans le tonneau. | bis
Le père qui arrive
En grande diligence,
Trouva sa femme au lit
En grande maladie.
⎯ Ah ! qu’as-tu donc ma femme,
Tu m’as l’air bien malade.
C’est-y pas la salade
Qui t’a rendue malade ?
Ou si c’est la liqueur
Qui t’a fait mal au cœur ?
⎯ Ce n’est pas la salade
Qui m’a rendue malade,
Mais c’est bien la liqueur
Qui m’a fait mal au cœur.
Le père de bonne grâce
Il descend dans la cave,
Prit sa bouteille en mains
Pour lui tirer du vin.
Il tape dans la tonne,
La tonne lui résonne,
S’est écrié tout haut :
⎯ Y’a plus d’vin dans l’tonneau !
Le père tout en colère
Il brisa sa bouteille,
Prit son bâton en mains
Pour lui cassér les reins.
⎯ Ah ! qu’as-tu donc mon homme ?
Tu n’as pas l’air commode…
Le long de mon côté
Viens donc t’y reposer.
⎯ Toi et ta cousine,
Vous n’êtes que deux coquines,
Vous buvez tout mon bien,
Mes enfants n’auront rien.
|
||||
12. |
||||
L’autre jour, je m’y promène
Tout le long de mon jardin,
C’était pour cueillir la rose
Qu’il y avait dans mon jardin.
Ah ! j’aime à boire, j’m’en fais t-une gloire !
Je veux dépensér tout mon bien.
Souvent j’ai le cœur volage,
Je prends le temps comme il vient.
Hier au soir, j’étais à boire
Avec plusieurs compagnons,
Ce sont des gens de ma sorte,
Ils s’enivrent à la boisson.
Ah ! j’aime à boire […]
Tous les jours ma mère m’y gronde,
Elle me traite de libertin ;
Elle dit que je suis dans ce monde
Pour lui causér du chagrin.
Ah ! j’aime à boire […]
Lorsqu’on m’y parle du mariage,
Tout cela ne me dit rien,
Ce sont ces enfants en bas âge
Qui demandent toujours du pain.
Ah ! j’aime à boire […]
Que veulent dire ces grands robes-noires ?
« Requiescat in pace… »
Ils veulent dire qu’on s’en va boire
Tout l’argent d’nos amitiés.
Ah ! j’aime à boire […]
Le bedeau, ce grand ivrogne,
Fera-t-il tout comme nous ?
Boira-t-il dans l’autre monde
Comme il a bu parmi nous.
Ah ! j’aime à boire […]
Mon père me donne mon héritage,
Mon héritage et tous ses biens,
C’est la boisson qui’en est la cause
Aujourd’hui si je n’ai plus rien.
Ah ! j’aime à boire […]
|
||||
13. |
||||
⎯ Ivrogne, ivrogne, arrive dans ton logis,
Ne sais-tu pas qu’il passe minuit ?
Depuis ce matin que tu es partie
Et tu n’y reviens qu’à minuit,
Tu sembles comme une femme qui est hors de raison,
Qui ne pense plus à sa maison.
⎯ Plus doux, plus doux, mon p’tit homme, plus doux,
Il ne faut pas parler si haut.
J’ai eu l’malheur de prendre un coup de trop,
Et tout à coup je me suis senti chaude
Et j’ai bien attendu qu’les voisins [é]taient couchés,
Pour les empêcher de bavasser.
⎯ Comment, ivrogne, oses-tu venir ici
Pour me conter une pareille menterie ?
La raison d’arriver à minuit,
C’est qu’tu croyais d’me surprendre endormi,
C’est qu’tu croyais pouvoir te mettre au lit
Sans le laisser assavoir à ton mari !
⎯ Plus doux, plus doux, mon p’tit homme, plus doux,
Tu connais bien les gens d’en haut.
Les gens d’en haut ce sont tous des bavards,
S’ils s’aperçoivent que j’arrive tard,
Oh ! ils diriont que j’arrive toujours saoule
Et qu’on se chicane comme des fous.
⎯ Oh ! Grand Dieu, j’aurais jamais cru,
C’est d’avoir une femme comme toi !
Tous les samedis soir, tu es toujours saoule,
Et tu ne rapportes jamais un sou.
Moi qui étais si bien chez nous,
J’ai bien envie de t’en saprer des coups !
⎯ Plus doux, plus doux, mon p’tit homme, plus doux,
Il ne faut pas parler si haut.
Je sais bien que tu étais bien chez vous,
Et moi aussi j’étais bien chez nous,
Tu m’as pris, je t’ai pris, je t’ai rejetée, |
Mieux vaut endurer sa p’tite bête que d’la tuer. | bis
|
||||
14. |
||||
Mes chers amis, je vous invite
En ayant tous le verre en main
Buvons, chantons et rions bien
Pendant qu’nous sommes dedans ce monde
Vivons contents et vivons bien
Peut-être nous s’rons tous morts demain.
À quoi servent-ils, tous les biens de ce monde,
Puisqu’il nous faut toujours mourir ?
Peut-être nous en trouverons pas
De ce bon vin dans l’autre monde,
Peut-être nous en trouverons pas
De cabaret dans c’pays-là.
Adieu les brunes, adieu les blondes,
Adieu les filles de grand renom ;
Souvenez-vous d’ces bons garçons
Qui ont fait l’amour avec adresse,
Souvenez-vous d’ces bons garçons
Qui ont fait l’amour avec raison.
|
||||
15. |
||||
Goûtons du plaisir, ma bergère
Car ce temps-là ne dure pas.
Le vin le plus durable,
C’est le vin de l’amour,
Il ne faut point tant boire
Que d’abréger nos jours.
Sans le vin je ne puis vous plaire,
Sans le vin tout m’est ennuyeux.
Quitte là ta houlette
Et buvons tous les deux :
Tu en seras moins fière
Et moi plus amoureux.
Un prêt’ me demande à confesse
— Laquelle aimerez-vous des deux ?
Aimez-vous la bouteille ?
Aimez-vous les doux yeux ?
Je lui réponds : — Mon père,
Je les aime tous les deux.
La vie est dure et t-agréable,
L’amour est dur à cultiver.
Mais c’est un dur mélange :
Aimer sans être aimé.
Quand on aime bien t-une ange,
On cherche à le garder.
|
||||
16. |
Les poteaux de téléphone
02:56
|
|||
Le matin quand je m’y lève, j’y mets la main sur le cou,
Sur le cou de ma bouteille, j’lui fais faire un p’tit glou glou,
Que les hommes sont ivrognes, ça dépend des créatures,
Les poteaux de téléphone sont au bord-e des clôtures.
Ma femme jure et elle tempête quand je veux la caresser.
Elle a beau faire sa sévère, je n’peux pas m’en empêcher.
⎯ Oh ! ma femme, si tu m’y grondes, j’abandonn’rai le logis,
Dans la cave la plus profonde j’y ferai dressér mon lit.
Un tonneau sera la table où je prendrai mes repas,
Mais ma charmante bouteille je ne l’abandonn’rai pas.
Si je meurs, j’veux qu’on m’enterre dans la cave où y’a du vin,
Les deux pieds contre la muraille et la tête sous le robin.
S’il en tombe quelques gouttes, ça fera rougir mon teint,
Et si le baril défonce j’en boirai jusqu’à demain.
Au bout de la quarantaine, cent ivrognes m’avaient promis
De venir la tasse pleine pour chanter De profundis.
Se disant les uns aux autres en s’y mettant t-à genoux :
⎯ Boira-t-il dans l’autre monde comme il a bu parmi nous ?
Vous ferez sonner pour cloches tous les pots du cabaret,
Vous allumerez pour cierges quatre verres de vin clairet.
Les quat’ filles les plus canailles porteront les coins du drap
Et les quat’ plus grands ivrognes chanteront des Libera.
|
||||
17. |
||||
Usons librement de nos biens,
Usons librement de nos biens.
Méprisons l’avarice
Car c’est un méchant vice
Qu’il n’appartient qu’aux chiens,
Usons librement de nos biens.
Les avaricieux sont des sots,
Les avaricieux sont des sots !
Quand ils sont à la table,
Ils boivent qu’en misérables,
Ils boivent que de l’eau.
Les avaricieux sont des sots !
Je bois le vin tout pur sans eau,
Je bois le vin tout pur sans eau.
Ce vin qui est si rare,
Sur ma foi, je déclare :
J’en bois par demi-pot !
Je bois le vin tout pur sans eau.
J’aime l’eau pour l’amour du vin,
J’aime l’eau pour l’amour du vin.
Le vin remplit nos verres,
L’eau arrose nos terres,
Fait mûrir le raisin.
J’aime l’eau pour l’amour du vin.
Voyez ces bels arbres des champs,
Voyez ces bels arbres des champs.
Voyez comment ils croissent
Malgré le froid, la glace,
Ils fleurissent en leur temps.
Voyez ces bels arbres des champs.
La vigne est chargée de raisins,
La vigne est chargée de raisins.
Voyez ces belles branches,
Ces bell’s branches qui penchent,
La tête joint le pied ;
Ça m’fait rapp’ler de ce beau temps passé.
Le temps passé ne revient plus,
Le temps passé ne revient plus.
Ce temps si agréable,
Ce temps si favorable,
Le voilà donc perdu,
Le temps passé ne revient plus.
|
||||
18. |
||||
Nos armateurs-e nous cherchent
Partout dans ces auberges
Sans pouvoir nous trouver ;
À la dernière auberge,
Nos armateurs-e nous trouvent :
⎯ Enfants, il faut partir.
Enfants, virons de bord-e,
Tirons notre bordée
Le cap dans l’Est-Nordet,
En lui disant : ⎯ Mon sieur,
Il nous faut aller en croisière
Sur ces mâts d’artimon.
Nous étions trois corsaires,
Tous trois plein vent arrière
Sans pouvoir nous quitter ;
Une jolie frégate
Qui nous donne la chasse
S’emmanche auprès de nous.
Adieu la Guadeloupe,
Nous te quittons sans doute,
C’est dans notre destinée,
Pour aller z-en croisière
Rejoindre toutes nos bons frères
Qu’ils vont nous saluer.
Le lendemain t-à l’aurore,
J’ai t-aperçu t-un coble
Qui est au vent à nous ;
Oh ! y’a qu’la petite dorade,
Marchant comme l’orage,
Dans la nuit nous quitta.
|
||||
19. |
||||
Rions, chantons, aimons, buvons,
En quatre points, c’est ma morale.
Rions tant que nous le pouvons,
Afin d’avoir l’humeur égale.
L’esprit sombre, que tout aigrit,
Tourmente ce qui l’environne ;
Et l’homme heureux, qui toujours rit,
Ne fait jamais pleurer personne.
Souvent les plus graves leçons
Endorment tout un auditoire ;
Mettons la morale en chansons
Pour la graver dans la mémoire.
À ses vœux un chanteur, dit-on,
Rendit l’enfer même docile.
Orphée a montré qu’un sermon
Ne vaut pas un bon vaudeville.
Quand Dieu noya le genre humain,
Il sauva Noé du naufrage,
Et dit, en lui donnant du vin :
« Voilà ce que doit boire un sage. »
Buvons en donc jusqu’au tombeau ;
Car d’après l’arrêt d’un tel juge,
Tous les méchants sont buveurs d’eau :
C’est bien prouvé par le déluge.
Un cœur froid qui jamais n’aima,
Du ciel déshonore l’ouvrage ;
Car pour aimer, Dieu nous forma,
Puisqu’il fit l’homme à son image.
Il faut aimer, c’est le vrai bien.
Suivons, amis, ces lois divines :
Aimons toujours notre prochain,
En commençant par nos voisines.
|
||||
20. |
||||
Buvons, mes chers amis, buvons,
Buvons tous à la ronde ;
Que tous ceux qui sont ici
Qu’ils viennent, qu’ils me secondent.
D’une main je tiens mon verre
Et ma bouteille de l’autre,
Qu’on m’y verse un coup à boire
En attendant z-une autre.
Tout disparaît à mes yeux,
Tout vire et tout culbute :
Les montagnes z-et les cieux,
Les vallons et les buttes.
Le vin, c’est mon trésor
Et moi qu’en a le charme,
Fera rouler mon corps
Dans le fond de l’auberge.
Il est temps de m’en aller,
Le vin perd sa finesse ;
Je me sens m’appesantir
D’un sommeil qui me blesse.
Là j’ai pris mon chapeau :
— Bonsoir à tout le monde !
On se r’verra bientôt,
On boira z-à la ronde.
|
Liette Remon Québec
LIETTE REMON, originaire de Petit-Pabos sur le côté sud de la péninsule gaspésienne et fille de violoneux, oscille avec bonheur entre tradition, renaissance, moyen-âge et musique expérimentale. Elle est récipiendaire en 2010 du prix Innovation/Tradition qui vise particulièrement à souligner l’innovation et l’originalité dans la présentation publique d’une pratique culturelle. ... more
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